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L'émulation, tout un débat !

Dernière mise à jour : 28 déc. 2022

L’émulation, selon Riccardo Fassone, a pour but de restituer les mécanismes internes d’une machine, en traduisant leur fonctionnement en code, afin de les rendre indépendants de leur support d’origine (1). Pour faire simple, l’émulation permet de jouer à une console, une borne d’arcade ou un micro-ordinateur, sur un PC (ou tout autre machine supportant les logiciels concernés). Cette pratique fait cependant débat depuis des dizaines d’années. A titre personnel, j’étais (et je suis toujours) un grand utilisateur de l’émulation. Cela m’était fort utile quand, enfant, je souhaitais jouer à des consoles que je n’avais pas, ou découvrir les vieux jeux d’une saga (au hasard The Legend of Zelda). Comme nous le verrons tout au long de cet article, il plane autour de cette façon de jouer tout un tas de rumeurs, de fausses affirmations et d’inventions de la part du grand public. Le but de ce papier n’est pas de faire la morale ni de donner une réponse à la question “‘Est-ce bien ou mal de faire de l’émulation de consoles?”. Nous allons plutôt définir et décortiquer cette pratique, depuis sa création à nos jours, discuter sa réelle légalité et, enfin, débattre des différents arguments les plus répandus, en sa faveur ou non.



Un peu d’histoire:


Dans les années 60, IBM est roi sur le marché des ordinateurs. Ces derniers sont conçus de façon totalement indépendants d’une génération à l’autre, sans réelle compatibilité entre les modèles d’une même marque (2). En 1962, un utilisateur parvient à rendre un IBM 705 compatible avec le modèle précédent, le 1401; créant ainsi le concept de compatibilité descendante. Ceci permettrait de ne plus reprendre les softwares à zéro à chaque nouvelle itération d’un ordinateur d’une même marque, puisque les logiciels seront utilisables sur plusieurs générations. IBM confie cette mission à une entreprise française qui va développer ce qu’elle appelle la “simulation”. Avec cette technique, les logiciels vont cependant tourner deux fois moins rapidement que ce qui est prévu, rendant inutilisable ce concept par les professionnels. Pour corriger cela, Lary Moss va réfléchir en termes de hardware et va envisager l’idée d’avoir, entre chaque génération, une architecture matérielle aussi proche que possible de la machine précédente. Il mixera ainsi les paramètres software et hardware! Ceci fonctionnera à la perfection, n'entraînant aucune perte de performance: “l’émulation” est née (3). Le grand public suivra en achetant massivement le dernier IBM System/360 (intégrant le fameux système 7070 emulator) pouvant maintenant utiliser les logiciels des machines précédentes.

L'IBM 7070

Il faudra attendre les années 80 pour voir apparaître le concept dans l’informatique grand public, avec des émulateurs Amiga ou Commodore 64 pour PC et Macintosh (4). Une bascule a ensuite eu lieu dans la deuxième partie des années 90, avec le développement des émulateurs de consoles de jeu. La démocratisation d’internet a permis le partage massif de ces logiciels, largement développés par des amateurs. Pour cela, ils devront recréer le hardware des différentes machines: Cpu, Bios, chipsets graphiques et sonores., etc.. Il faudra cependant que la machine hôte soit 10 à 20 fois plus puissante que celle émulée, ce qui va restreindre l'émulation aux consoles de très anciennes générations (du moins au départ).



Quelques définitions :


Faisons enfin un petit rappel des définitions techniques:

  • La ROM est l’acronyme de Read Only Memory. Il s’agit de la mémoire morte, impossible à modifier, et qui contient les données du programme. La cartouche de jeu est quant à elle un circuit électrique comportant une ou plusieurs puces de roms, donc de programme. Il a été décidé, pour simplifier, qu’une rom servirait à désigner l’entièreté du jeu copié;

  • Un émulateur est un logiciel permettant de simuler une machine sur une autre, plus puissante et plus récente. Ceci permet de faire fonctionner des jeux sur d’autres supports que celui qui les faisait tourner initialement;

  • Un ISO est une extension de fichier désignant l’image d’un CD copié.



Mais est-ce vraiment légal?


Concernant les jeux en eux-mêmes, ceux-ci sont protégés par le droit d’auteur (ou Copyright), en tant que logiciel, depuis l’arrêté du 7 mars 1986 (5). Ainsi, toute reproduction et diffusion est illégale si elle n’ont pas été faite avec l’accord des ayant droits (6). Le fait d’avoir le jeu en version physique, ou de ne conserver la ROM que durant 24 heures, ne sont donc pas des exceptions valables selon la loi. Il existe cependant un écart possible: la copie de sauvegarde, selon l’article L122-6-1 du Code de la propriété intellectuelle (7). Ceci permet à un particulier de faire une copie de son logiciel afin de le conserver. On voit ainsi qu’il faut créer soi-même sa propre ROM à partir du jeu physique en sa possession pour être dans la légalité. Ceci rend donc la distribution de ROM illégale.


Un des plus célèbre site d'émulation

Intéressons nous maintenant aux émulateurs en eux-mêmes. De par son histoire, ils ne sont pas illégaux. Il y a cependant plusieurs “mais”. Le premier concerne le BIOS. Il s’agit du système d’exploitation (ou firmware) qu’utilise la console pour fonctionner (8). Il est illégal, comme tout logiciel, d’en faire une reproduction ou d’accéder à son code source. Ainsi, certains émulateurs nécessitant des BIOS, comme epsxe pour la PS1, voient leur utilisation très limitée. Le deuxième “mais” concerne les émulateurs sans BIOS comme Snes9x? En théorie, il est aussi illégal. Cependant, le Code de propriété intellectuelle autorise sa reproduction si elle est nécessaire à la compatibilité d’un logiciel, c’est-à-dire ici les ROMs. Cependant, cela reste très théorique et, devant un juge, il est très difficile de faire valoir ce droit (5). En effet, cela nécessite de n’utiliser que la partie du code de l’émulateur (et donc de la console) utile au fonctionnement des jeux, sans contourner les protections de type DRM. Ainsi, même le téléchargement d’un émulateur est en théorie illégal si sa construction a été faite en contrefaçon de son logiciel source. Pour conclure sur l’émulateur, tant que le particulier n’a pas touché à la partie logicielle de la console (et donc violer le brevet), il peut l’utiliser et le diffuser mais, si la console possède un BIOS, alors c’est impossible.

Il reste une particularité: l’ Abandonware (8). Il s’agit de jeux ne faisant plus l’objet d’une commercialisation ou d’une mise à niveau par le développeur. Il est alors possible, comme pour toute œuvre culturelle, d’attendre 70 ans pour qu’elle passe dans le domaine public. Ceci est cependant difficilement applicable au jeux vidéo du fait de la courte durée de vie moyenne des logiciels dans ce média. Ainsi, certains sites proposent ces jeux en libre accès. Ceci reste illégal mais les ayant droits ont tendance à laisser passer par désintérêt pour ces jeux. Le retour du dématérialisé, des compilations rétro ainsi que des remakes/remasters, risquent de faire revoir leur positionnement aux différents studios de développement ainsi qu’aux éditeurs.



Place au débat!


Maintenant que nous avons fini de faire le tour des définitions et du cadre légal de cette pratique, nous allons essayer de regarder les différents arguments pour et contre les plus couramment cités.


La préservation de notre saint patrimoine:


Le premier argument avancé est en général celui de la préservation du patrimoine vidéoludique (9). Il existe un archivage en France via la Bibliothèque Nationale qui, dans le cadre du dépôt légal, collectionne, préserve et communique sur le jeu vidéo depuis les années 90. Elle essaye ainsi d’augmenter ses acquisitions de jeux plus ou moins récents chaque année. Ces éléments sont accessibles, aussi bien en physique qu’en émulation, dans la salle P du bâtiment mais surtout à des fins de recherche.

Poste informatique de la salle P de la BNF

On trouve aussi des alternatives, comme les musées, mais ces derniers se sont heurtés à la diversité des droits d’auteurs dans le monde. Ceci limite malheureusement la disponibilité des consoles et des jeux qu’il est possible d’exposer ,et donc de rendre accessible au grand public. L’autre solution est alors le musée virtuel. Il en existe tout un tas sur internet, de qualités cependant très variables. Parmi les plus intéressants, on retrouve le site de l'association MO5 (qui n’est pas forcément favorable à l’émulation), old-computers pour les micro-ordinateurs, ainsi que des bases de données regroupant diverses informations, images, vidéos sur les jeux vidéos (vgmuseum, mobygames, etc…). Tous ces sites ne permettent pas de jouer mais restent des mines d’informations sur le média! On peut trouver dans certaines villes des expositions sur le jeu vidéo et son histoire, mais cela reste des initiatives locales et temporaires. On est donc très loin d’une conservation fidèle, accessible, gratuite et légale du patrimoine vidéoludique.

Pixel Museum, Bruxelles, Belgique

Pour James Newman, l’industrie du jeu vidéo s’oppose à toute forme de conservation (10). Des décisions d’éditeurs comme l'obsolescence (+ ou - programmée…) ou l’absence de rétrocompatibilité entre les machines d’un même constructeur, viennent soutenir cet argument. Ainsi, conserver ces jeux sous forme de logiciels permet d’avoir une trace de leur existence, mais aussi d’aider les générations futures à jouer à des classiques du média, à une époque où il deviendra impossible de faire fonctionner le matériel d’époque.

Toujours selon Newman, l’émulation reste cependant incapable de reproduire des éléments inhérents au support physique comme les pratiques matérielles et contextuelles liées à l’usage de l’objet (1, 10). Par exemple, l’émulation ne permet pas de comprendre la logique derrière le fait de souffler dans une cartouche de jeu qui ne marche pas bien (fake news au passage d’ailleurs) (11). De même, il est certes possible d’archiver tous les jeux mais certains, avec une grande partie communautaire comme les MMO, perdent toute leur signification lorsqu’ils ne se retrouvent que sous forme logiciel, et donc dépourvus de leur serveur. Pour pallier cela, la Bibliothèque Nationale de France a collaboré avec CCP, l’entreprise à l’origine du jeu Eve Online, pour enregistrer durant 24 heures les parties de nombreux joueurs volontaires. Ceci a permis de garder une trace vivante de ce jeu. Benjamin Barbier met en lumière qu'au-delà même du logiciel, l’émulation ne permet pas une conservation de tout ce qui est rattaché physiquement au jeu, comme la boîte ou la notice (12). Il ajoute que les sensations de jouer sur un écran de PC, même avec une manette mimant celle d’origine, ne reviendra jamais au même que de jouer sur une télévision cathodique avec le matériel et les câbles d'origine. Ne parlons d’ailleurs même pas de l’arcade, où la borne participe intégralement à l’expérience de jeu (les bornes Gundam au Japon ou même chez nous la fameuse borne pour Star Wars Racer).

La borne d'arcade Star Wars Racer

On voit donc que la préservation du jeu vidéo est plus compliquée que de simplement faire une copie du logiciel. Il y a en effet tout un côté (qu’il soit physique ou sociétal) qui ne peut malheureusement pas (ou difficilement) être sauvegardé…


Une question de prix, la PA$$ION?


L’argument suivant est le prix des jeux. On entend souvent dire que les jeux vidéos n’ont jamais été aussi chers. On va commencer déjà par parler du prix des consoles de jeu. France inter, en 2020, a calculé le prix des consoles en prenant compte de l’inflation (13). On peut trouver des PS5 pour 499€ (quand on a la chance d’en avoir), alors que la PS3, avec l’inflation, se vendrait aux alentours de 700€ aujourd’hui, ce qui en ferait la 4° console la plus chère de l’histoire (derrière la Neo geo, l’Atari 2600 et la Saturn). Chez Nintendo, la Switch se vendait en moyenne à 313€ en 2020, ce qui reste dans le standard de la firme (si on omet la NES et la WiiU). Pour Microsoft, la Xbox Series X se vend à 499€, ce qui est bien en dessous de la Xbox One mais surtout de la Xbox première du nom (la 360 fait figure d’exception dans la firme). Ainsi, si on prend en compte l’inflation, les consoles de jeux vidéo ne sont pas plus chères aujourd’hui, loin de là.

Mais qu’en est-il des jeux en eux-mêmes? A la Game Developers Conference, une étude montrait que le prix de développement des jeux suivait une courbe croissante depuis l’époque des 16 bits (14). Un jeu sur SNES ou Megadrive coûte entre 50 et 300.000 $ pour être développé. A l’époque de la Gamecube, ce prix était multiplié par 6, pour atteindre plusieurs dizaines de millions de $, sans compter le marketing.

En termes de prix à la vente, il faut distinguer deux périodes: celle des cartouches et celle des CD (15, 16). Concernant les premières, le jeu Tennis sur Atari coûtait 19,99$, ce qui faisait, en 2013, un équivalent de 48,18$ avec l’inflation. Concernant Bomber sur ZX Spectrum, l’écart est encore plus important (39,99 => 96,38$). Les jeux NES s’échangeraient aujourd’hui pour une somme comprise entre 60 et 80$, bien plus encore avec l’ère des 16 bits (Street Fighter 2 vaudrait 116,18$ aujourd’hui!).

Prix des jeux en cartouches, neufs, avec l'inflation

L’arrivée du CD-ROM a fait baisser le prix des jeux puisqu’un jeu sur PS1 coûtait rarement plus de 49$ (ce qui reste proche de 70$ en 2013). Ceci ne dura pas longtemps puisque dès 2006, avec l’ère PS360, les jeux coûtent de nouveau 59$ mais, avec la crise économique, cela restait inférieur en équivalence par rapport aux jeux des générations précédentes. Ceci n’a pas beaucoup changé jusqu’à récemment avec les jeux PS5 et Series. Au final, on voit que les jeux d’aujourd’hui coûtent certes plus chers à produire mais restent à l’achat moins chers que sur les générations plus anciennes. Bonne chance à l’époque si vous cherchiez à vous procurer un jeu cartouche pour moins de 60$ d’ aujourd’hui (soit 37$ d’époque).

Prix des jeux sur CD, neufs, avec l'inflation

On a donc une augmentation en chiffre absolu mais pas en relatif. Il faut cependant noter que, pour quelqu’un touchant le SMIC ou moins, l’achat d’un jeu vidéo peut être un luxe et l’émulation sera alors un moyen de jouer aux jeux vidéos sans se mettre en danger financièrement

Back in time:


On retrouve aussi souvent l’argument de l’accès, pour les plus jeunes, à tout un pan de l’histoire du médium sans pour autant se ruiner. Il est vrai que l’émulation permet, à toute personne, de parfaire sa connaissance de l’histoire du jeu vidéo, de Pong en passant par Galaga et autres vieilleries. Quand on voit la difficulté à pouvoir jouer à certaines de ces œuvres, on ne peut nier l’accessibilité permise par l’émulation. Par exemple, pour découvrir un jeu comme Strider sur Megadrive, il vous faudra:

  • Le jeu, accessible pour une trentaine d’euros d’occasion (voir moins en loose et avec de la patience);

  • Une console Megadrive, trouvable pour une cinquantaine d’euros sur leboncoin;

  • Un convertisseur Péritel/HDMI, qui coûte une dizaine d’euros, si vous ne souhaitez pas investir dans un téléviseur à tubes cathodiques.

Au total, on en aura donc pour un peu moins d’une centaine d’euros pour découvrir un des classiques du rétrogaming. Avec l’émulation, il vous faut:

  • Un PC ou un téléphone, ce que tout le monde a aujourd’hui;

  • Un des nombreux émulateurs Megadrive;

  • La rom du jeu Strider.

Ici, le coût est famélique puisque le support est intégré à votre usage quotidien. De plus, vous n'aurez qu’à télécharger une autre rom pour pouvoir découvrir d'autres classiques de la console.

Strider sur SEGA Megadrive

Cependant, les constructeurs se sont vite rendu compte de l'attrait pour cette culture du rétrogaming (et de l’argent qu’ils pouvaient se faire…). On a donc vu apparaître la mode des “consoles mini”. En gardant cet exemple, vous pourrez jouer à Strider pour environ 80€ en achetant une Megadrive Mini sur Leboncoin. L’avantage, au-delà de la possession d’un bel objet, est que vous aurez un support physique quasi identique à ce qui se faisait à l’époque (en terme de manette notamment). De plus, le convertisseur est déjà inclus dans la machine. Vous pourrez enfin avoir accès, tout comme avec l'émulation, aux save states et autres rewards. Donc, pour quasiment la même somme qu’avec “du vrai retrogaming”, vous aurez une expérience similaire (pas identique attention), et accès à plusieurs dizaines d’autres jeux du catalogue. Les éditeurs ont très vite flairé le bon filon et Nintendo, Sega et même Sony ont eu une période “consoles mini”. Ceci s’est assez vite arrêté et, hormis Sega, plus personne ne sort ce genre de produits.

SEGA Megadrive mini

Il reste cependant une dernière alternative pour jouer à Strider: la Switch Online. Pour un abonnement fixe, vous avez accès à la même chose qu’une console mini, mais en dématérialisé. Cependant, l’émulation n’est pas aussi fiable d’une console à l’autre (cf le portage désastreux de la Nintendo 64). Il existe enfin, pour les micro-ordinateurs, des sites rendant l’émulation légale. C’est le cas du ZX Spectrum avec le site worldofspectrum qui a l’accord des éditeurs pour environ 10% de la ludothèque, et qui la rend disponible gratuitement et légalement sur son site.

On a donc tout un tas de façon de consommer des jeux rétro, allant de la reproduction de l'expérience à l'identique jusqu'à l'émulation sur son téléphone. On ne peut malheureusement pas dire que le coût soit identique et l'expérience originelle reste un privilège réservé aux plus riches...


Un florilège de fan service:


Un nouvel argument est le modding, et toute l’activité de la scène amatrice. On va de nouveau prendre un jeu comme exemple: Dragon Quest V. Le jeu est sorti sur Super Famicom au Japon en 1992, puis a connu divers remakes: PS2 en 2004 puis DS en 2008 (ressorti sur Android en 2014). Cependant, ce jeu n’est jamais sorti de l’archipel avant la DS. Ainsi, pour le découvrir, un joueur devait trouver:

  • Une console japonaise;

  • Le jeu Dragon Quest V;

  • Un convertisseur électrique car l’ampérage et le voltage ne sont pas les mêmes entre les pays;

  • Un adaptateur VGA/HDMI selon les écrans.

Comme nous l'avons vu précédemment, tout ceci représente un coût qui peut aisément grimper à plus de 100 voire 150€. A ceci, il faut ajouter que le jeu sera dans la langue de Toriyama, et donc incompréhensible pour toute personne non bilingue, ce qui est dommageable pour un JRPG… Grâce à l’émulation, vous aurez accès à la fantraduction du jeu, en anglais certes, et ce dès les années 2000!

Dragon Quest V sur Super Famicom, fantrad

On va maintenant parler de l’optimisation des jeux. Il en existe de 2 types. Vous avez d’abord celle que vous pouvez faire directement via l’émulateur. Il existe tout un tas de tuto sur le net qui vont vous permettre, moyennant un peu de temps passé dans les options, de magnifier votre jeu et le rendre quasi méconnaissable (cf l'exemple ci-dessous avec le jeu Jojo's Bizarre Adventures: Ougon no Kaze sur PS2).

Les puristes diront que cela dénature l’expérience originale mais je préfère dire que cela rend accessible des jeux à des personnes qui n'y auraient pas touché sans ces modifications.

Il existe ensuite les mods. Moyennant l’installation de plusieurs fichiers, vous pouvez totalement métamorphoser vos jeux. 2 exemples me viennent en tête dans l’immédiat:



  • The Legend of Zelda: Ocarina of Time a eu un remaster sur 3DS à la sortie de la console. Des fans ont décidé de créer un pack de texture 4K pour magnifier le jeu, et le résultat laisse sans voix (insérer images). L’expérience est ici totalement modifiée graphiquement, se rapprochant des artworks conceptionnels du jeu, en faisant l'expérience ultime pour apprécier cet archi classique du jeu vidéo;



  • Final Fantasy IX a eu plusieurs remaster, plus ou moins bien fait par Square Enix. Des fans ont cependant créé le Moguri Mod. Ce dernier, à l’instar de Zelda, va créer l’expérience parfaite pour découvrir le dernier FF de l’ère 32-bits. Ces génies du modding ont modifié totalement le jeu sur le plan graphique avec, grâce à une intelligence artificielle, des fonds en HD, des calques redessinés intégralement, un vrai 16:9, des corrections de bugs visuels du jeu original, une ré orchestration de la bande originale et des vidéos qui tournent à 30 fps. C’est malheureux à dire mais, ces fans ont fait un meilleur travail de remasterisation que l’éditeur lui-même…


On voit donc ici que l’émulation peut permettre de rendre accessible des jeux qui ne le seraient pas, soit par le budget nécessaire pour réunir tout le matériel nécessaire, soit par une barrière de la langue. Mais l'émulation permet aussi de renouveler l’expérience de jeu en modifiant profondément ces derniers, notamment sur le plan graphique.


Tout un univers à portée de main:


Un argument un peu personnel est que l’émulation m’a permis de finir des jeux que je n’aurai pas fait autrement. C’est le cas du jeu Super ghouls'n ghosts sur Super Nintendo. Le jeu a la réputation d’être très très très dur (Dark Souls à côté se fait les yeux fermés…). Cependant, grâce aux save states, rewinds et autres aides, j’ai pu en venir à bout avec un challenge plus adapté à ma façon de jouer. Je sais cependant que bon nombre de joueurs vont me dire que je n’ai ainsi pas vécu la “vraie expérience" proposée par le jeu… Cet argument se tient puisque le “Die & Retry” fait partie intégrante de ce genre de jeu. Cependant je n’aurai jamais eu la patience pour le faire.

Super Ghouls'n Ghosts, SNES

De même, certaines personnes utilisent la fonction d’accélération des émulateurs pour pouvoir rendre plus facile certains JRPG et le farming qui y est lié. Enfin, cela peut permettre à des personnes en situation de handicap d’avoir accès à des aides qui seraient inexistantes sans l'existence de l’émulation.

Certains vont cependant me dire qu'ils ne sont pas doués en informatique et n’ont pas la patience de passer plusieurs heures sur un logiciel pour tester un simple jeu. Ce à quoi je répondrai que je le comprends parfaitement! Il existe cependant, de nos jours, des sites comme romstation qui permettent d’avoir des émulateurs et roms “clés en main” pour pouvoir tester tout un tas de jeux. Mais ceci peut amener à créer une surconsommation avec un effet “fast food”. En effet, face à une ludothèque infinie, disponible avec un seul clique, on peut très vite être amené à n'essayez les jeux que 5 minutes avant de passer à un autre. Et, en si peu de temps, peut-on vraiment dire qu’on a eu accès à l'expérience proposée par les développeurs? J’ai cherché mais je n’ai trouvé aucun travail sur le sujet...



Il est temps de conclure:


Nous venons de voir que le sujet de l’émulation est très complexe. Il ne peut se limiter à “je suis pour” ou “je suis contre” sur de simples arguments binaires. En effet, l’émulation va dépendre grandement de ce que va en faire le joueur “mais pas que”. D’un côté, cela permet de conserver une trace de tout le travail réalisé par les développeurs (les éditeurs faisant tout pour éviter cela), de faire découvrir cela aux nouvelles générations de joueurs ainsi qu’aux personnes à faibles revenus, mais aussi de rendre accessibles des jeux qui, sans l’aide des fans, seraient restés coincés dans la longue liste des jeux “sous-cotés”. Cependant, malgré tous ces arguments, il existe aussi des dérives car, il faut partir du postulat que c'est une pratique illégale. De plus, et comme beaucoup de services à la demande, cela peut entraîner un phénomène de surconsommation. Il n'y a donc pas de réponse à la question: est ce bien ou mal? A chacun de se faire son avis sur la question et j'espère vous avoir donner quelques pistes de réflexion!



Bibliographie:


  1. Riccardo Fassone, « Archiver les jeux d’arcade : rhétorique et idéologie de l’émulation vidéo-ludique », Tracés. Revue de Sciences humaines [En ligne], 28 | 2015, mis en ligne le 01 janvier 2017, consulté le 17 décembre 2022. URL : http://journals.openedition.org/traces/6178.

  2. Grospixels, Les origines de l’émulation. [En ligne], mis en ligne le 20 avril 2001, consulté le 17 décembre 2022. URL : https://www.grospixels.com/site/emustory.php

  3. Tom’s HARDWARE, L’émulation: comment, pourquoi? [En ligne], mis en ligne le 1 février 2012, consulté le 17 décembre 2022. URL: https://www.tomshardware.fr/lemulation-comment-pourquoi/2/ .

  4. F.Gechter, Le retro-gaming pour les nuls - tout savoir sur le retrogaming, les émulateurs et l’abandonware. [En ligne], mis en ligne le 14 novembre 2016, consulté le 17 décembre 2022. URL : https://www.rom-game.fr/news/2328-retrogaming+emulateurs+abandonware.html .

  5. Agence Française pour le Jeu Vidéo, Technique et légalité des émulateurs de jeux vidéos. [En ligne], mis en ligne le 1 février 2016, consulté le 17 décembre 2022. URL : https://www.afjv.com/news/5894_technique-et-legalite-des-emulateurs-de-jeux-video.htm .

  6. Loi du 10 mai 1994 du code de la propriété intellectuelle. Article L122-6. [En ligne], consulté le 17 décembre 2022. URL: https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006278919/#:~:text=122%2D6%2D1%2C%20le,moyen%20et%20sous%20toute%20forme .

  7. Modification par ordonnance du 24 novembre 2021. Article L122-6-1. [En ligne], consulté le 17 décembre 2022. URL: https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000044365559 .

  8. Millenium. Emulation, droits d’auteur. [En ligne], mis en ligne le 15 septembre 2013, consulté le 17 décembre 2022. URL : https://www.millenium.org/news/132859.html .

  9. N.Esposito. Emulation et conservation du patrimoine culturel lié au jeu vidéo. [En ligne], 2004, consulté le 17 décembre 2022. URL : https://www.researchgate.net/publication/215673465_Emulation_et_conservation_du_patrimoine_culturel_lie_aux_jeux_video

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  11. M. Coville. Préserver les jeux vidéo et l’acte de jouer. [En ligne], 7 avril 2020, consulté le 17 décembre 2022. URL : https://shs.hal.science/halshs-02534970/document .

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  14. Jeux.ca. Opinion - Préparez-vous à une hausse du prix des jeux vidéos au Canada. [En ligne], le 23 juin 2020, consulté le 17 décembre 2022. URL : https://www.radiofrance.fr/franceinter/les-consoles-de-jeux-video-coutaient-elles-vraiment-moins-cher-avant-6667388 .

  15. Ars technica. Why retail console game have never been cheaper, historically. [En ligne], le 30 juin 2013, consulté le 17 décembre 2022. URL : https://arstechnica.com/gaming/2013/06/why-retail-console-games-have-never-been-cheaper-historically/

  16. TSERET. Les jeux vidéo sont-ils vraiment plus chers. [En ligne], le 10 aout 2022, consulté le 17 décembre 2022. URL : https://tseret.com/les-jeux-video-sont-ils-vraiment-plus-chers/

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