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  • Photo du rédacteurMalinoRox

De Link's Awakening à Outer Wilds, l'exploration comme vecteur d'émotions.


D’aussi loin que je me souvienne, l’exploration m’a toujours fasciné et à toujours fait partie de ma vie de gamin.

Quel sentiment fabuleux, que celui de partir à l'aventure. La sensation de l'inconnu, de l'émerveillement, quand chaque petite découverte est un moment de bonheur.

Pas besoin de cavernes mystérieuses ou de forêts secrètes, bien souvent les petites choses des lieux du quotidien suffisent.

Il m’est impossible de me souvenir de tous les moments, de toutes les matinées ou après midis passées en compagnie de ma sœur ou de mon cousin à arpenter le vaste terrain de nos grands parents ou le jardin familial.

Tout était prétexte à l’exploration. Les larges et denses haies de lauriers, les champs derrière la maison, la vieille cabane au fond du jardin, la grande butte d’orties, les bosquets alentours ou, graal parmi les graals, le terrain des voisins et sa vieille cave en pierre, dont le contenu potentiel fut synonyme de bien des fantasmes.


Le plus drôle dans toutes ces aventures est la propension qu'a l'imaginaire a nous faire rêver. Bien sur que nous n'allions pas trouver de squelette dans la cave ou de carte au trésor dans la cabane, mais notre esprit créatif faisait le reste et nous pouvions passer des heures dans ces aires de jeux qui nous paraissaient alors gigantesques.


Durant ces années de jeunesse et d'exploration, il est une saga qui n'a cessé de m'accompagner, The Legend of Zelda, ode à l'exploration par excellence.

Le tout premier jeu vidéo que je touchais de ma vie fut The Legend of Zelda : Link's Awakening, et immédiatement son univers me happa. Quoi de plus formidable étant gosse que de farfouiller dans les moindres recoins de l'Ile Cocolint, d'imaginer ce qu'il pourrait bien y avoir dans toutes ces cases de la carte encore inconnues. Expérimenter, essayer, parfois abuser le jeu. - "Si j'utilise mes graines Pégase, et que je saute un peu en biais, je suis sur que je peux passer par-dessus ces trous" (fun fact : j'ai perdu ma première sauvegarde ainsi, étant passé par-dessus un endroit non prévu et n'ayant jamais pu revenir…).

Et à l'âge de 6 ans, le virtuel s'est vite incrusté dans le réel. "Et si cette grotte était en réalité le repère des Moblins !" "Si on s'enfonce dans la forêt on tombera peut être sur la sorcière et son chaudron ?" … "Imagines que cette vieille bâtisse soit en fait l'entrée d'un donjon… Il nous faut la clé pour l'ouvrir !!"


Mon gout pour l'exploration se renforçait grâce à Zelda, et dans le même temps mes aventures dans le monde réel renforçaient mon amour pour les jeux en les rendant vivants dans mon esprit. Les choses n'iraient pas en s'arrangeant quand 4 ans plus tard je passais du Gameboy au Gameboy Advance avec A Link to The Past et son monde toujours plus grand. Cette fois plus de Cocolint, mais Hyrule et la princesse Zelda. De nouveaux donjons, des montagnes avec toujours plus de possibilités, un désert mystérieux, des tas de secrets, d'objets cachés optionnels parfois surpuissants, de temples tortueux et surtout le Dark World et le Miroir Magique ! Tant de potentielles trouvailles ! Tant de recoins ! La aussi il me serait bien impossible de me remémorer le nombre d'heures passées à naviguer d'un monde à l'autre afin de tester chaque coin de la carte dans l'espoir de trouver un endroit un peu secret auquel on n'accède que de cette manière.

Ce jeu qui est l'un de mes jeux favoris continua d'alimenter bon nombres de jeux d'enfants. Quel bonheur de se prendre pour Link et de partir à l'assaut d'une forêt obscure ! Encore une fois, l'imaginaire faisait tout, car il ne faut pas se mentir, cela restait des pixels sur un écran minuscule et non rétro-éclairé, et les aventures de Link prenaient vie dans tout ce qui se construisait autour du jeu dans ma tête.

C'est 4 ans plus tard qu'allait arriver le jeu qui finirait de sceller mon amour de l'aventure et qui est encore aujourd'hui mon jeu favori, Ocarina of Time. Grandissant, les jeux d'enfants disparaissaient et les terrains autrefois sources de mythes et d'histoires prenaient leur taille normale dans ma tête. Le voile de l'imaginaire se levait sur tout cet univers bâti avec le temps, la part d'aventure de la réalité s'amenuisait. Alors quand dans le même temps je découvrais Ocarina of Time, que cet Hyrule tant fantasmé prenait vie devant mes yeux, que les rêves devenaient réalité, quelle claque ce fut; le jeu vidéo allait pouvoir continuer à développer cet amour. Habiter dans une cabane dans la forêt Kokiri, explorer l'intérieur du gigantesque Arbre Mojo, visiter l'énorme citadelle d'Hyrule, rencontrer les Gorons, les Zoras, tant de choses merveilleuses…

Et je dois bien avouer à ce moment là que je passais bien plus de temps à me promener dans le jeu qu'à suivre sa quête principale. Puis vint ma deuxième claque… à mesure, qu'à mes yeux, j'entrais dans la cour des grands en vieillissant, je faisait la connaissance de Link dans sa version adulte. Un Hyrule dévasté, ravagé, a explorer complètement. Fini de rigoler, le souffle épique de l'aventure était présent. Temples au fond des Bois Perdus, dans les recoins d'un désert aride ou au fond du Lac Hylia, tout rendait ce jeu fantastique à mes yeux.


Au fil des années la saga Zelda continua de m'accompagner que ce soit avec ses épisodes sur console de salon ou ses épisodes portables. Je décidais donc il y a quelques semaines, après avoir fini Outer Wilds, de me pencher sur la série, de réfléchir sur les leviers qu'elle actionne pour si bien recréer le sentiment d'aventure et d'exploration que nous connaissons étant enfant, et sur pourquoi, à mon sens, Outer Wilds en est le meilleur héritier et dans le même temps ce vers quoi The Legend of Zelda devrait aller.

Ma réflexion avançant, je renotais 5 points plutôt récurrents, utilisés par les équipes de Nintendo pour refaire vivre ces sensations aux joueurs. Points qui même si ils paraissent évident ne sont pas présent dans tant de jeux que ça tant Nintendo reste maitre en la matière. Je vais donc tenter d'expliquer et d'illustrer ici pourquoi cette saga rayonne dans ce domaine.


Comment c'est loin !


Un premier point, et surement le plus évident, selon moi parfaitement retranscrit par Nintendo, est la sensation d'être dans quelque chose de grand, voire d'immense malgré que leurs mondes ne soient pas les plus vastes. Impression qui apparut dès le premier épisode 3D de la saga, Ocarina of Time. Le but de Miyamoto et de ses équipes a toujours été de nous faire vivre l'exploration, c'est d'ailleurs avec cette idée en tête, que le tout premier The Legend of Zelda sur NES vit le jour. Malheureusement, dû aux limitations techniques des machines, cela restait toujours très superficiel. En tant que joueurs, la seule chose que nous avions connus jusqu'à présent était donc des écrans vus de haut, de taille unique ou presque sur des cartes relativement modestes. Et même dans le début de Ocarina of Time, nous ne découvrions que la Forêt Kokiri relativement peu spacieuse, et ses couloirs. On passe nos premières heures de jeu dans un environnement cloisonné, et d'un seul coup à la sortie de cette forêt, le jeu joue sur notre perception visuelle des choses. La plaine d'Hyrule s'ouvre à nous. Impossible d'en voir le bout en un seul coup d'œil. Presque autant de directions possibles que ce que l'on veut. Il ne tient qu'à nous de partir découvrir cette zone de jeu gigantesque. Nous passons d'un couloir et d'un espace relativement fermé à une grande zone s'étendant à perte de vue. La sensation est réussie, l'impression de respirer est la, tout comme celle de quitter le cocon familial, tout cela grâce à un jeu de contraste.

Ce processus est réutilisé dans le dernier né de la saga, Breath of the Wild. La aussi démarrage dans une zone vraiment sombre et étroite au réveil du héros, puis sortie, lumière éblouissante et plan déjà iconique sur cet Hyrule absolument gigantesque. Impossible de pouvoir tout voir, la sensation d'être face à quelque chose de beaucoup plus grand que nous est réelle. Immédiatement on se sent minuscule dans un monde qui nous offre la possibilité d'aller dans toutes les directions, aussi loin que ce que nous pouvons voir. La gestion du visuel et de la ligne d'horizon est ici capitale. En nous plaçant en hauteur, sur ce mont du prélude, le jeu nous offre un point de vue immédiat sur notre environnement tout en nous faisant voir le plus loin possible. Vous voyez un point ? Pas de problème vous pouvez y aller.

L'utilisation de cette ligne d'horizon sera la même dans The Wind Waker. En effet, quel sentiment plus grisant que celui de partir explorer l'immensité de la mer sur son bateau avec parfois rien d'autre à l'horizon que le vide. On avance, on se perd, on ressent pleinement la solitude, on ne sait pas où aller, mais quelle sensation incroyable que de voir poindre à l'horizon les contours d'une île, pouvoir s'y rendre, y accoster et découvrir comme sur l'Ile du Dragon, une toute nouvelle population, son histoire, ses habitudes etc.

En seulement trois exemples clés, on voit que cette sensation d'immensité, que l'on connait dans notre jeunesse est ici retranscrite de la meilleure des manières. Plans sur l'inconnu, vastes étendues, contrastes, ligne d'horizon la plus lointaine possible afin de créer ce ressenti d'être minuscule. Quoi de mieux pour pousser à l'aventure ?


Et pourtant si proche....


Mais si ce n'était que cela, cette exploration serait rapidement fade, car de lointains horizons beaucoup de jeux savent le faire. Il lui faut donc des outils en plus.

Une des clés de la magie de l'exploration dans l'enfance est que, dans notre imaginaire, les secrets peuvent être partout. Comme dit plus haut, les lieux du quotidien peuvent regorger de mystères, tout peut être prétexte à l'émerveillement ou à la découverte. Le dessous d'un rocher, un trou dans une haie ou le vieux grenier familial.

Ce concept présent depuis Zelda 2 prendra vraiment toute son ampleur dans A Link to the Past et Ocarina of Time. Le village Cocorico du dernier cité peut être visité de manière parfaitement classique, mais c'est une fois que l'on commencera à explorer de fond en comble que l'on se rendra compte que le village regorge de petites choses à découvrir, de trésors, de quarts de cœurs, etc. On peut passer beaucoup de temps dans ce village, le fouiller, et avoir l'impression de le connaitre sur le bout des doigts, mais Nintendo saura twister ça en cachant devant nos yeux le plus grand secret du village. En effet, plus tard, ce puit devant lequel nous sommes passés un grand nombre de fois, qui est au centre du village et qui semble totalement anodin, nous révèlera en seconde partie de jeu un mini donjon complet. Non seulement le village regorge de petits secrets que l'on découvre si l'on en prend le temps, mais même après des dizaines d'heure de jeu, dans ce lieu que dont on pense avoir fait le tour, il se cache encore des choses. Le fantasme d'enfant prend vie sous nos yeux… même dans un lieu anodin de village peut se cacher une grande découverte.

Il en sera de même dans The Minish Cap, mais cette fois ci la méthode sera différente. Encore une fois l'idée des lieux et objets du quotidien est réutilisée, mais Big N va jouer sur les perspectives. En effet dans un premier temps nous découvrons et jouons avec Link dans sa taille normale, mais peu de temps après nous serons miniaturisés. Il va donc être possible de redécouvrir tous ces endroits familiers ou nous sommes passés auparavant, maison, échoppes etc. L'idée du trésor présent sous nos yeux depuis le départ est encore au cœur de l'expérience. Petits trous dans les murs, jarres retournées, charpentes etc. Non seulement Nintendo nous dit que la magie peut opérer partout, mais également que l'on peut avoir loupé tant de choses au premier coup d'œil. Pour ceux ayant connu les Minipouss ou des films comme Arrietty des studios Ghibli, cette imagerie nous parle et nourrit cet univers. L'incroyable est potentiellement juste derrière ce mur que l'on connait pourtant si bien.

Breath of the Wild reprendra ce concept à merveille mais cette fois à plus grande échelle. Dans ce dernier, en général, pour peu que l'on aperçoive quelque chose qui nous intrigue ou que l'on décide d'explorer tel ou tel lieu, on trouvera un trésor, un secret, un peu de lore, (ou dans le pire des cas un Korogu sous un rocher). Et ce dès le plateau du prélude. A peine commencé notre périple que l'on peut immédiatement trouver dans ce qui nous entoure divers trésors, diverses choses à faire, de nouvelles armes etc. On décide de monter sur le toit du temple du temps ? Récompense. On brave le froid pour voir ce qui est de l'autre coté de la colline ? Récompense. Cette zone pourtant familière et accessible dès le début prendra plusieurs heures si on veut l'explorer à 100%. Les "récompenses" sont partout même quand on pense connaitre notre zone de jeu, et ça le jeu l'a bien compris quand même après 100 heures de jeu on découvre des petites choses nous ayant échappées.


Titiller la curiosité pour mieux nous immerger.


Troisième levier utilisé par Nintendo et ses équipes, la réflexion, l'utilisation de notre sens de l'observation. Un des grands plaisir de l'exploration, est le fait de nous poser des questions, de nous interroger sur un lieu, son histoire, etc . Questionnements qui nous pousseront à creuser, à vouloir en savoir toujours plus, à nous immerger.

Un des exemples les plus frappants est l'utilisation des ruines dans Breath of The Wild. Ruines qui parsèment le monde, ruines sur les quelles forcément nous nous poseront des questions lors de nos passages. Qu'est il advenu des gens vivant ici ? Pourquoi cette région est elle ravagée ? Pourquoi tant de carcasses de gardiens ? Et sur moi l'effet a fonctionné. Me plonger dans les villages détruits, ou les champs de batailles a été un vrai plaisir. Plaisir renforcé quand par exemple au milieu d'une maison délabrée je pouvais trouver un livre, un journal des gens ayant vécu ici me permettant de creuser un peu le lore du jeu. Que c'est jouissif quand on a l'âme aventurière, l'âme d'archéologue de trouver ce genre de détails amenant de la vie à notre environnement. De revivre les choses vécues par les précédents propriétaires. Je suis ici poussé à l'exploration par la narration environnementale et récompensé de ma curiosité par des informations que je n'aurai pas eu forcément autrement.

Ce procédé n'a pas été ajouté avec ce jeu, et était utilisé plus ou moins directement dans les anciens opus. Il était par exemple déjà présent dès Majora's Mask. Dans MM le lore était la aussi en bonne partie optionnel et ne se laissait découvrir que si l'on prenait notre temps pour tout explorer, parler à tous les personnages etc. C'était le moyen utilisé pour comprendre comment chacun en était arrivé la, voir comment chaque personnage gérait la fin du monde à venir, etc. Et Nintendo nous attirait vers eux, vers ces questionnements grâce à une galerie de personnages attachants. Ainsi poussés par notre envie d'en savoir plus nous pouvions découvrir toute la portée du titre et nous imprégner de son ambiance marquante. Il est dur d'être resté insensible à la quête totalement annexe du jeu qui nous contait le destin tragique de Anju et Kafei et à comment ces deux personnages à leur manière géraient le drame qu'ils vivaient. Majora's Mask est rempli de ce genre de détails récompensant les joueurs ayant voulu pousser leur expérience au maximum en laissant libre cours à leurs interrogations sur la palette de personnages hauts en couleurs du titre.

A contrario, dans certains opus, ce processus se faisait uniquement visuellement. Cette fois le but n'est pas de nous faire trouver des réponses, mais simplement ressentir de l'introspection, de nous laisser dans nos questions. L'un des moment qui m'a le plus frappé dans l'histoire de la saga est le Temple du Temps de Twilight Princess… ou plutôt les ruines du Temple du Temps. Ici au fin fond de la forêt, dans le bosquet sacré on tombe sur les ruines impressionnantes du temple du temps. Et forcément les questions fusent dans notre tête quand portés par l'ambiance et la musique, on découvre ces vestiges, que l'on se questionne sur les événements ayant conduits à cette destruction. Nintendo joue sur tout cela pour nous donner une impression de rentrer dans le passé, impression vécue peu de temps après quand littéralement nous pourrons visiter ce temple. Résultat identique mais procédé différent. L'utilisation de nos sens fonctionne ici à merveille. On observe, on découvre, on se questionne et on se crée nos propres réponses. La narration environnementale peut faire un tel travail… et Nintendo l'a bien compris tant elle est de plus en plus utilisée dans ses jeux Zelda.


Moi perdu ? Jamais !


Ce qui m'amène au quatrième point, l'utilisation que font les développeurs de nos sens et particulièrement de notre sens de l'orientation.

Il arrive fréquemment en effet que Nintendo joue avec nous pour recréer une autre sensation que l'on a quand on part explorer, la sensation d'être perdu.

Ce procédé bien que possible avant, a vraiment pris du sens avec l'arrivée de la 3D et Ocarina of Time. Dans OOT, on peut rapidement se retrouver en effet dans les Bois Perdus et la aussi selon notre manière de jouer ou notre talent naturel, nous pouvons nous perdre, trouver des zones optionnelles très intéressantes, les quitter, ne plus savoir comment y revenir, etc.

Et ce sera repris jusque dans Breath of the Wild où la aussi nous aurons des Bois Perdus dans lesquels nous pouvons nous égarer et où il nous faudra trouver des moyens de nous repérer et d'avancer si nous voulons atteindre le centre des bois. Une fois encore, imaginaire simple, une forêt, mais sensations que l'on peut tous connaitre, le sentiment de perdre nos repères classiques.

BOTW utilisera aussi ce concept dans les dédales. Dans ces labyrinthes, si on veut les faire à la régulière, (car Breath of the Wild étant Breath of the Wild, il est possible de contourner tout cela pour faire notre sauce) il est facile de se retrouver à tourner, à ne plus savoir où aller, où nous sommes passés, etc. La sensation est parfaitement recrée, l'atmosphère oppressante des murs gigantesques et sombres remplissant parfaitement son objectif, et j'ai vécu avec ces dédales trois des meilleurs moments que j'ai connu dans ce jeu et dans la saga.


Le jeu twistera un peu le concept quand une autre fois il nous plongera dans le noir ou presque avec les Ruines des Obscurcies. Cette fois encore notre sens de l'orientation est mis à l'épreuve, et seule la lumière de notre torche nous permettra de nous guider dans ce lieu la aussi volontairement oppressant mais ou l'absence de lumière ajoute un coté Temple souterrain ancien qui fonctionne à merveille. On tourne, on se perd, on perd nos repères classiques, et on en trouve d'autre pour nous sortir de ces situations.


Même pas peur !


Dernier point que nous allons évoquer, en lien avec le précédent, l'utilisation de la tension, du stress voire de la peur.

La tension est quelque chose d'inhérent à l'exploration notamment quand l'on est jeune. On se fait une montagne de beaucoup de choses, on est à la fois excité, à la fois un peu effrayé quand l'on décide d'explorer un lieu totalement inconnu voire interdit. On est donc face à un des sentiments principaux que doit générer une bonne exploration.

Big N recrée ce sentiment par deux moyens.

Le premier est le visuel. Pour illustrer, un exemple parlant est la Tour du Jugement de Twilight Princess, édifice imposant en plein milieu du désert. On devine les contours de cette structure quand on progresse dans cette étendue sableuse. Au loin on commence à apercevoir ses tours imposantes, sa forme bien particulière, et on se sent minuscule. En effet, l'endroit n'a vraiment pas l'air accueillant, on sent que l'on y est pas le bienvenu, il est en plus bien gardé et l'arrivée de nuit avec ses jeux de lumières fait son petit effet. Pour peu que l'on soit un peu craintif on a pas forcément envie de visiter un tel lieu mais on y est obligé. En soit ce temple ne sera pas plus ou moins dur que les autres rencontrés dans le jeu mais juste de par son aspect on arrive à ressentir une tension et à ne pas forcément vouloir y entrer.

Les ennemis sont également une deuxième source pour générer de la tension. Ils sont classiques dans les jeux vidéos mais un type d'ennemis en particulier a retenu mon attention, les morts vivants du Temple de l'Esprit d'Ocarina of Time. En effet une fois un peu de skill atteint, quand en temps que

joueur on prend confiance, les ennemis du jeu ne posent plus trop de soucis. Pour contrer cela, nos morts vivants apparus avec cet épisode auront recours a une attaque bien spécifique, un cri qui nous paralysera, empêchant tout mouvement, ou attaque. On perds donc nos moyens pendant quelques instants en voyant l'ennemi avancer vers nous avec son cri glaçant. Excellent moyen de nous faire ressentir du stress et nous faire sortir de la zone de confort dans laquelle nous pouvions être à ce stade du jeu.

Cette perte de moyens sera reprise dans Skyward Sword, ou cette fois ce sont des zones entières, les Psysalis, que nous auront à explorer sans aucune arme face à des ennemis surpuissants. Nouvelle façon de créer du stress, de l'adrénaline en changeant nos habitudes… on revisite des lieux connus mais dans un contexte totalement nouveau, ce qui donne selon moi les meilleurs moments de cet opus.

Nous avons donc vu 5 leviers que Nintendo utilise pour nous pousser à l'exploration et la rendre toujours plus gratifiante ou intéressante en recréant des sensations que nous avons pu éprouver dans notre jeune âge.

Ces dernières années ont cependant vues l'émergence d'un nouveau type de jeu, les jeux en monde ouvert, et le dernier né de la saga, Breath of the Wild a adopté ce système, ce qui a crée quelques soucis assez paradoxaux.

Nous avons enfin une aire de jeu gigantesque, à la hauteur de nos fantasmes les plus fous de fans, mais malheureusement une telle aire de jeu engendre forcément quelques problèmes.

En effet, une telle carte amène obligatoirement des zones pas toujours remplies de la meilleure des manières. Je pense aux 120 sanctuaires et aux 900 Korogus à trouver... C'est sympa un temps mais un poil répétitif (doux euphémisme) sur le long terme. Ce qui peut laisser un sentiment de vide, de futilité à certaines sessions d'exploration, et l'on peut perdre, au fur et à mesure des heures de jeu, notre intérêt pour l'aventure.

Il existe cependant un jeu qui de manière assez surprenante est selon moi un héritier parfait, bien que très différent, de la saga. Jeu qui reprend pas mal de choses à Breath of the Wild, même si son scope est beaucoup plus modeste tout en apportant selon moi des solutions aux soucis de BOTW et une idée de ce que pourrait être le futur de la série.

C'est donc ce que je vais essayer de décrire ici en vous parlant de l'un de mes coups de cœur de la génération et un de mes jeux favoris de tous les temps. J'essaierai ensuite de donner quelques idées de comment la suite annoncée de Breath of the Wild pourrait capitaliser sur cette nouvelle manière de faire de l'open world.

Je vous invite donc à monter dans ma fusée direction l'univers d'Outer Wilds


Coucou ! Tu veux voir ma fusée ?



Je vais être honnête, j'ai fait beaucoup d'open world ces 2, 3 dernières années. J'ai adoré explorer certains comme Horizon Zero Dawn ou Red Dead Redemption 2, mais malgré l'amour que je peux leur porter, aucun de tous ces jeux ne reproduit aussi bien les sensations d'explorations de The Legend of Zelda que Outer Wilds, et c'est dû selon moi à l'utilisation des mêmes leviers que les TLOZ.

Tout d'abord, dans Outer Wilds comme dans Breath of the Wild, la liberté est totale (ou presque car dans ce dernier, il nous faut quand même terminer la zone du prélude). Dans Outer Wilds comme dans BOTW, libre à nous d'aller ou bon nous semble, dans la direction que l'on a envie. Dans les deux jeux, si on se sent suffisamment en confiance, on peut se rendre directement à la fin du jeu, en une petite vingtaine de minutes pour OW, en un peu plus quand même pour BOTW. Mais l'idée est là, liberté totale d'action. Liberté de passer 50 heures sur le jeu ou pas.


La principale différence entre Outer Wilds et BOTW est qu'aussi grande soit notre liberté, le jeu jouera avec nos connaissances et notre sens de l'observation et de l'exploration afin de nous rendre impossible l'accès à la fin du jeu sans avoir d'abord vécu ce qu'il désire nous faire vivre.

Comment donc arrive t-il à inclure sa narration et son expérience totale dans un jeu avec tant de liberté ?


Dans Outer Wilds, nous débutons notre aventure sur la planète Atrebois. Nous ouvrons les yeux, en face d'un feu de camp, dans notre village à priori natal. Et à partir de là libre à nous de partir explorer comme nous le voulons l'univers, une fois trois étapes obligatoires remplies, la récupération du traducteur Nomaï, des codes de lancement de la fusée, et notre découverte de la statue Nomaï de l'observatoire (5/6 minutes).

Une fois cela fait l'entièreté de l'univers et des planètes du jeu est accessible. Malgré tout, nous ne savons pas ce que nous faisons la… ni quel est notre vrai but. Les développeurs jouent ainsi parfaitement avec notre curiosité naturelle, tout en nous préservant. En effet, si l'on connaissait notre objectif immédiatement, il est probable que l'on puisse, en tant que joueur, se sentir dépassé par les événements. Car Outer Wilds fait partie de ces rares jeux ou une fois que l'on comprends l'objectif final du jeu, on peut se sentir incapable de l'accomplir.

Je dois confesser que plus j'avançais dans le jeu, plus je prenais conscience de ce que j'allais devoir réussir, moins je me sentais capable de le faire…

Ce que je trouve très intéressant c'est que ce sentiment est voulu par les développeurs. On arrive à cette sensation, alors que le jeu en soit n'est pas compliqué. Et cela grâce à plusieurs procédés de game design.



Comme dans la saga Zelda, le jeu va jouer sur la sensation d'immensité. L'univers entier s'offre à nous dans Outer Wilds et dès notre première sortie en fusée, nous pouvons apercevoir plusieurs planètes très variées, elle-même regorgeant de secrets. Que ce soit Léviathe et ses tornades, Sablière et son flot constant, ou même Cravité et ses météorites, il y a de quoi rapidement se sentir minuscule, voire impuissant face à ces éléments déchainés. L'univers vit sans nous, et nous ne sommes qu'un élément au milieu de rouages qui nous dépassent. Rouages qu'il nous faudra apprendre à connaitre et à maitriser. Immensité qui sera contrebalancée comme dans Zelda par l'idée que chaque lieu même anodin peut recéler un trésor, une information parfois capitale.


Outer Wilds jouera aussi sur notre sens de l'orientation et la possibilité que nous avons de nous perdre. Que ce soit dans les dédales de Sablière Rouge, ou dans le noyau de Sombronces, il est très facile de s'égarer et de perdre ses repères. Dans un cas on est en partie dans le noir et les couloirs souterrains sont labyrinthiques, et dans l'autre on est dans une genre de brume ou il devient rapidement compliqué voire impossible de se repérer sans utiliser correctement les outils mis à disposition par le jeu. Est donc recréé ici parfaitement le sentiment que l'on peut avoir quand on se perd dans une grotte, ou dans le brouillard. Des situations simples mais bien exploités par nos créateurs.

Surtout qu'à cela s'ajoute la tension comme dans les jeux Zelda. Dans Outer Wilds, aucune possibilité de combattre. Le jeu s'amuse donc par exemple dans Sombronces à nous rajouter en plus du brouillard oppressant des Cœlacanthes géants… et je peux vous assurer qu'avant d'avoir trouvé la technique (et même une fois la stratégie obtenue), il y a de sacrés moments de stress quand au milieu de ce silence terrible on essaie de passer avec notre fusée sans se faire repérer de ces créatures effrayantes. Le jeu crée également de la tension par des moyens plus simples. Les jauges de carburant et d'oxygène de notre combinaison qui nous rajoutent du stress quand nous sommes proches de la fin et que nous ne savons plus ou est notre fusée. Le niveau de sable qui monte en continu dans Sablière Rouge et qui pourra nous coincer dans certaines zones, nous en rendre d'autres rapidement inaccessibles ou… tout simplement nous étouffer. Même procédé sur Cravité ou la planète s'effondrant sur elle-même nous fera par moments vraiment paniquer et je vous garantie que la première fois que l'on tombe dans un trou noir, on ne se sent pas bien.

Enfin premier détail qui frappe dans Outer Wilds, au bout de 22 minutes tout disparait et nous sommes ramenés à notre feu de camp sans comprendre ce qu'il se passe. Cette limite des 22 minutes plane toujours au dessus de nous, et quand la musique du reboot se lance et qu'il nous reste des choses à faire, que l'on veut se dépêcher d'atteindre un point etc on ressent une fois encore cette adrénaline, ce stress inhérent à ce chronomètre fatal au dessus de nos têtes.

On en vient donc au dernier levier d'Outer Wilds, la connaissance, les interrogations. Le design de Outer Wilds est pensé par rapport à notre soif de connaissance, et les questions que l'on peut se poser. On sera amené et je n'en dirait pas trop pour ne pas spoiler le jeu rapidement à rencontrer des ruines, d'anciens écrits dans une langue inconnue, et a retracer toute l'histoire de cet univers, démêler ces informations.

Toutes ces informations seront compilées dans un journal de bord et nous permettront de comprendre notre environnement, son histoire, le maitriser et in fine résoudre la grande énigme du jeu. C'est ici notre envie d'explorer, de découvrir qui nous poussera à progresser toujours plus dans cette fresque spatiale formidable.

Le jeu est donc régulièrement ponctué de moments "Euréka!" ou après avoir déchiffré des stèles, trouvé des informations on trouve enfin une solution a nos problématiques. C'est en effet régulier que l'on explore un endroit, que l'on ne comprenne pas certaines choses, comment passer un obstacle ou utiliser tel ou tel système, que l'on parte explorer ailleurs, que l'on trouve des informations qui nous débloqueront la suite de l'aventure, pour arriver parfois à de grands moments. La Lune Quantique pour ne citer qu'elle et sa résolution grâce à tout ce que j'avais découvert au court de mes aventures me conduisit à l'un de mes plus grands moments de jeu vidéo, entre fascination et profond respect.


Voila donc un jeu qui offre une liberté totale tout en la couplant à un intérêt jamais stoppé pour son univers et son exploration. Jeu qui recrée parfaitement les sensations que l'on peut ressentir en partant explorer dans la vie réelle et qui s'offre même le luxe de nous embarquer avec lui dans une narration maitrisée de bout en bout.


La Suite ?


Nous en arrivons donc à mon dernier point, comment la suite de Breath of the Wild gagnerait, selon moi, à s'inspirer de Outer Wilds.

Nous avons vu plus haut que le principal défaut de Breath of the Wild était l'inutilité de certaines parties de sa carte, et une narration trop peu présente ce qui amène petit à petit un désintérêt pour son exploration si l'on est facilement rebuté par la répétitivité et ce malgré les très grandes qualités du titre.

Une boucle de gameplay que j'ai trouvé très intéressante dans BOTW est la recherche des souvenirs. Gameplay à la fois simple mais qui nous pousse à explorer et à être attentif à notre environnement tout en progressant dans le lore du jeu. Ici on a une grosse dizaine de photos que nous allons devoir utiliser pour retrouver les lieux ou elles ont été prises et ainsi une fois sur place, permettre à Link de regagner certaines parties de sa mémoire. Procédé très intéressant mais malheureusement beaucoup trop peu exploité.

Nous savons tous que la narration n'a jamais été la priorité de Nintendo mais pour un jeu Zelda quasi entièrement basé sur l'exploration elle me semble néanmoins primordiale.

J'en suis donc venu à imaginer ce à quoi pourrait ressembler sa suite en empruntant à Outer Wilds tout en restant dans l'esprit de Nintendo qui ne deviendra pas du jour au lendemain un Final Fantasy.

Imaginez le début de la suite de Breath of the Wild. On vous donne votre objectif. Trouver X objets éparpillés dans Hyrule (un nombre raisonnable, et non pas 50). Or la seule chose que l'on sait c'est que … ils sont quelque part sur la carte et c'est tout. Pas d'autres indices, si ce n'est qu'ils ont été disséminés par un ancien peuple qui vivait là des centaines d'années auparavant.

Nous voila donc partis explorer le monde, chercher des indices, des stèles, des journaux, parler aux habitants etc à la recherche d'indices.

Indices qui nous mèneront vers une zone ou nous chercheront d'autres réponses, de la narration environnementale etc afin de comprendre ce qu'il a pu se passer, notre environnement et enfin trouver des entrées de temples, comment les ouvrir etc. Et petit à petit le jeu pourrait même aller de surprise en surprise en nous amenant vers des choses inattendues.


On aurait ainsi un bon moyen de contrôler notre progression tout en la laissant totalement libre. Pas de contraintes et la possibilité de nous balader comme bon nous semble, mais une narration maitrisée car elle se baserait sur une découverte du passé et de tous ses mystères jusqu'à être en mesure de résoudre les grandes problématiques que le jeu aurait mis en place. Comme dans Outer Wilds et Breath of the Wild on aurait tous nos outils directement à disposition et notre progression se baserait sur nos connaissances et nos recherches.

L'utilisation de vrais mystères et de vraies choses/lieux cachés permettrait en plus de cela de donner un souffle beaucoup plus épique au jeu et sa découverte tout en renouvelant bien plus l'expérience sur le long terme que de simples puzzles à Korogus.

L'utilisation de procédés comme les souvenirs pourraient aussi être approfondis. Photos qui nous amènent à chercher des lieux, mais une fois sur place quand nous avons identifié l'endroit, on part en chasse de ce que l'on est sensé trouver dans la zone, on explore, on identifie et une fois que l'on a compris ce que l'on est sensé faire sur place on atteint notre objectif, aussi varié soit il.

Comme dans Outer Wilds, pourquoi ne pas supprimer ou fortement diminuer les trésors et autres coffres. Il serait intéressant que les récompenses soient moins basiques (rubis / armes, …). Donner par exemple du lore comme le faisait déjà le jeu, mais accentuer cela, des infos utiles, des clés précises de progression ou autre; en somme, des récompenses beaucoup plus intrinsèques. Le jeu parviendrait de cette manière a toujours rendre son expérience intéressante et attractive, contrairement à BOTW ou trouver un coffre dont on sait qu'il aura un rubis ou une arme alors qu'on en a déjà 12 similaires dans notre inventaire ou 8000 rubis en poche n'a, passé un certain stade, plus aucun intérêt.

Encore une fois, Breath of the Wild posait des bases extrêmement solides. Un vrai renouveau pour la saga, même s'il utilise des clés macro déjà utilisés par ses ainés à échelle micro. Un vrai renouveau pour l'open world également. Mais pour moi tout ceci n'est qu'un premier jet et doit permettre à cette série de capitaliser dessus et de bâtir une vraie expérience d'exploration captivante de bout en bout couplée de moments épiques qui ont fait lé renommée de The Legend of Zelda et qui pourrait à nouveau, l'espace d'un jeu me faire revivre ces émotions que j'aime tant.







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1 Comment


luez.heidi
May 19, 2021

Quel bel article ! Une belle découverte pour moi concernant Outer Wilds ( qui est maintenant dans ma liste de jeux à faire 😅 ) Que de bons souvenirs sur ces Zelda mythiques ! Des heures d'explorations au chrono !

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